Les analyses de base en micronutrition (1er partie)
J’ai déjà développé dans un précédent article l’importance des bilans nutritionnels dans la démarche de micronutrition. Parfois des bilans spécifiques sont nécessaires pour faire un point précis sur une situation.
- On pense par exemple à des dosages IgG devant des hypersensibilités multiples à beaucoup d’aliments.
- On pense à des analyses des métabolites urinaires du microbiote devant des dysbioses importantes… ou pour objectiver la présence d’une candidose digestive.
- On pense à des évaluations spécifiques de l’environnement micronutritionnel des hormones thyroïdiennes devant des contextes de dysfonction de la glande qui produit ces dernières.
- On pense à une analyse des marqueurs de porosité intestinale devant des signes qui la font suspecter…
Mais cependant, dans plus d’une consultation sur deux, un bilan de micronutrition « généraliste » suffit pour optimiser la démarche. C’est le check up de base du micronutritioniste. Il est plus ou moins commun aux laboratoires qui font les analyses de micronutrition. Voyons dans les grandes lignes en quoi il consiste et ce qu’il peut apporter comme information.
Le bilan des acides gras érythrocytaires
Qu’est-ce que ce bilan ?
C’est un bilan d’une très grande importance. Précisons d’emblée, puisque l’on parle d’acide gras, que cette analyse n’a rien à voir avec le bilan médical des lipides plasmatiques : les fameux triglycérides, cholestérol LDL, HDL… On parle ici d’une analyses des acides gras composants la membrane des globules rouges qui va nous donner un reflet de la composition de la membrane de toutes les cellules du corps. Pourquoi ces acides gras sont-ils si importants ? Parce qu’ils sont une des premières fondations de la santé. Le mot fondation est choisi ! Une certaine catégorie d’acides gras, dit polyinsaturés, à laquelle appartiennent les fameux Oméga 3, participe de la structure de nos cellules. Disons pour schématiser fortement (il le faut bien dans le cadre d’un petit article) qu’ils participent à la « souplesse » de nos cellules. Ceci est un premier point clef. Cette « souplesse » est essentielle pour toutes les fonctions cellulaires impliquant les membranes de nos cellules (synapses, récepteurs…). On en compte des milliers ! Mais ces acides gras sont aussi des acteurs clefs de l’inflammation. Ils constituent une des pièces maîtresses de la cascade inflammatoire. Trop de mauvais acides gras (oméga 6, trans…) relativement aux Oméga 3, et c’est la certitude d’une majoration des processus inflammatoires.

Que nous apport t-il ? Ce bilan nous donne une image de la qualité des apports lipidiques dans l’alimentation. Il nous apporte des informations sur comment corriger les apports en acides gras dans de multiples situations : dépression, anxiété, perte de mémoire, risque cardiovasculaire, surpoids, pré-diabète, fertilité, SPM, toutes les pathologies inflammatoires… Pour en savoir un peu plus lire cet article spécifique.
La ferritine
Une base peut être évidente, mais de nombreuses personnes ne savent souvent pas à minima leur statut martial. Évidemment, tout le monde connait les contextes de carence en fer et la fatigue chronique. La fatigue peut d’ailleurs survenir avant l’anémie dites « ferriprive » (baisse de globule rouge) car le fer est essentiel au fonctionnement de nos « usines énergétiques » (les mitochondries). Ainsi, le manque de fer induit déjà une fatigue par défaut de production énergétique. En micronutrition, on s’y intéresse pour de très nombreuses autres raisons. En premier lieu il faut savoir qu’il ne faut pas donner de complémentation de fer sans avoir fait un dosage initial. On ne supplémente pas en fer à l’aveugle ! Car si on en a trop à la base, en apporter plus est dangereux : le fer est pro-oxydant, avec majoration du risque inflammatoire, risque de cancer… Pensant faire du bien, on fait alors du mal ! Le fer est impliqué dans des centaines de réactions métaboliques et notamment un type de réaction biochimique clef appelée hydroxylation. Ce type de réaction concerne notamment le métabolisme des neurotransmetteurs (sérotonine, dopamine, noradrénaline…), la synthèse des stéroïdes, la détox (la détox de tous les polluants, médicaments, hormones… comporte deux phases, dont la première est une hydroxylation, dépendante du fer : donc carence en fer = gros problème de détox), la synthèse de vitamine D… On voit à nouveau à quel point ce bilan est essentiel car il touche de nombreuses fonctions. On a des dépressions par carence en fer, on a des pertes de mémoire, on a des problèmes de détox… Notons aussi qu’une carence en fer peut être masquée par une inflammation chronique. En cas d’inflammation en effet, la ferritine augmente (c’est une protéine de stockage qui capte le fer pour qu’il ne soit pas disponible pour des pathogènes, car le fer favorise leur développement – donc c’est une mesure de prévention de notre corps ou un principe de précaution en langage moderne !). D’où l’intérêt de faire en même temps qu’une ferritine, une CRPus (marqueur inflammatoire) dans ce bilan.
La CRP, marqueur inflammatoire

J’ai consacré un article entier à cette analyse qui est sans doute une des plus importantes en pratique de micronutrition. Il nous révèle la présence d’une inflammation chronique dites de bas grade. Ces petits niveaux d’inflammation permanents sont impliqués dans ce très nombreuses problématiques de santé si caractéristiques de notre monde moderne. La liste serait trop longue dans le cadre de cet article, mais citons le surpoids, le diabète, les problématiques cardiovasculaire, de nombreux désordres intestinaux, dépression, fatigue et infections chroniques… Ce type d’inflammation est dites systémique car si elle est révélée par cette analyse c’est qu’elle est diffuse, présente dans tout notre corps, elle touche tous les systèmes, elle ne reste pas localisée à un endroit précis (comme c’est le cas par exemple d’une inflammation due à une coupure par exemple). Or, les molécules inflammatoires circulantes ont un impact sur notre biologie globale et créent des dégâts. Un foyer inflammatoire initial va donc éprendre son « feu d’inflammation » dans tout le corps. Cette analyse nous révèle donc ce « terrain inflammé » dont il va falloir s’occuper. Nous recoupons les résultats de CRPus avec les résultats des acides gras qui vont également, on l’a vu, nous parler du terrain inflammatoire.
Le HOMA
Le métabolisme des glucides est très important à comprendre lorsque l’on travaille en micronutrition. La plupart du temps seule la glycémie (taux de sucre dans le sang) fait partie du bilan de base de votre médecin (plus l’hémoglobine glyquée si vous êtes déjà diabétique). Si vous avez une glycémie entre 0,8g/l et 1,1 g/l, votre médecin vous dit RAS à ce niveau. En micronutrition on aime creuser un peu plus (creuser un peu plus… ou plutôt prévenir que guérir) ! Car une glycémie peut être maintenue normale par une augmentation de la sécrétion d’insuline. Votre pancréas qui sécrète l’insuline travaille davantage pour garder votre glycémie dans des valeurs normales. Il faut savoir que ce contrôle de la glycémie est juste vital, car trop de sucre provoque des dégâts considérables dans le corps. Comme l’oxygène le sucre est à la fois indispensable à la vie et en même temps très dangereux! Ainsi, il faut connaitre en plus de la glycémie le taux d’insuline. A partir des valeurs de glycémie et d’insulinémie (taux insuline dans le sang) on calcule un score appelé Homa. Avec une glycémie normale, ce score peut ainsi nous révéler si le pancréas travaille normalement ou si il « force sa cadence ». Qu’est-ce que cela nous dit, si on constate que ce pancréas a un régime augmenté ? Cela révèle que les cellules du corps deviennent globalement moins sensibles à l’insuline, on parle de résistance à l’insuline. Car un des rôles majeurs de l’insuline c’est de faire rentrer le glucose dans la cellule !
Le schéma est le suivant : moins de sensibilité à l’insuline à l’insuline > le sucre ne rentre plus dans la cellule > la glycémie tend à augmentée > le pancréas reçoit le message de plus sécréter d’insuline > augmentation de l’insuline dans le sang… Or quel est le problème ? Cet hyper insulinisme chronique est très mauvais pour la santé. L’insuline est une hormone de stockage !! On prend du poids ou on a du mal à en perdre. L’insuline augmente l’inflammation (recoupement ici avec l’examen précédent). Mais un hyperinsulinisme est impliqué dans bien d’autres choses (pour en savoir plus lire l’excellent article d’une collègue) citons par exemple le Syndrome des ovaires polykystique (1re cause de fertilité anovulatoire). Un test HOMA perturbé révèle donc qu’il faut agir sur ce terrain de résistance à l’insuline. Or, bonne nouvelle il y a pleins de choses à faire dans ce cas ! Alimentation faible Index glycémique, jeune intermittent, phytothérapie et autres micronutriments (Cr, Zn, Mg) peuvent faire disparaître un terrain de résistance à l’insuline. Et aussi un bon taux de vitamine D diminue la résistance à l’insuline…
Vitamine D
La vitamine D fait partie sans doute des compléments alimentaires les plus utilisés, surtout en période hivernale, tout le monde sachant que cela prévient les risques infectieux. C’est une bonne chose. Mais cette usage très commun a son revers : la banalisation (c’est d’ailleurs le même problème pour le magnésium !). Et qui dit banalisation du mésusage ! On prend ses gouttes de vitamine D en hiver comme on prend sa petite tisane du soir sans trop même savoir ce qu’il y a dedans, juste parce que « c’est bon pour la santé » ! Or, si la vitamine D est sans doute la vitamine la plus importante du corps il semble essentiel qu’on lui accorde la juste valeur qu’elle mérite, en prenant grand soin de sa prise. Comment ?
- Premièrement, en partant d’un dosage initial ! En effet, si on est a 15 ng/L ou 35 ng/L la supplémentation proposée ne va pas être la même. Avec un dosage à 15 ng/L une supplémentation de 1000 UI n’aura aucun effet !! En fonction du dosage initial on pourra proposer une complémentation adéquate, personnalisée.
- Ensuite en ayant des valeurs santé en valeur cible. Viser 60 à 70 ng/L. La valeur seuil de 30 ng et les normes classiques des laboratoires sont intéressantes essentiellement pour les risques d’ostéoporose. Mais si vous voulez avoir des bénéfices santé pour bien d’autres indications il faut viser plus haut ! Le le Pr Castronovo et le Dr Résimont, acteurs référents en micronutrition, recommandent des taux au alentour de 60 ng pour avoir des « impacts-santé » sur les maladies inflammatoires (SEP, asthme, polyarthrite, lupus,… ), métaboliques (diabète, surpoids, cardiovasculaire), l’immunité, sarcopénie, dépression…
- Puis il faut prendre soin de son mode de prise. La vitamine D est une vitamine liposoluble. Il faut prendre la complémentation après un repas contenant du gras pour qu’elle soit bien absorbée dans votre corps… sinon elle finit dans les toilettes !
- Enfin, on refera un dosage après 2 mois de complémentation pour s’assurer que cette dernière est efficiente. En effet, par exemple un défaut d’absorption des graisse par »paresse biliaire » ou une vidange biliaire inappropriée (stress) limitera l’absorption malgré une prise optimale.
- Puis on s’assurera d’avoir un bon taux (ou à minima un bon apport) de vitamine A. L’action de la vitamine D est dépendante de la présence de vitamine A… voir notre prochaine article…
A suivre « les analyses de base en micronutrition » 2ème partie :
- La vitamine A – la complémentaire santé !
- les minéraux clefs du métabolisme : Zinc, Cuivre et Sélénium
- Quelques marqueurs de stress oxydant
- L’homocystéine : reflet indirect des vitamines B12, B6, B9
- Les hypersensibilité alimentaires à travers les IgG de base : Gluten, caséine…
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